La médecine tibétaine

La médecine tibétaine

C'est une médecine traditionnelle originale, synthèse des médecines chinoise, arabe et indienne. Elle a failli disparaître au début des années 1970 à la suite des évènements politiques au Tibet. Mais elle a résisté et connaît aujourd'hui un nouvel essor.

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Sommaire

- Le diagnostic en médecine tibétaine
- Changer le comportement
- Une pharmacopée originale
- Des thérapies corporelles
- Où trouver un praticien ?
- Vers une médecine intégrative ?

Comme toutes les médecines traditionnelles asiatiques, la médecine tibétaine considère l'être humain dans sa globalité.
"Elle s'attache autant à l'équilibre du corps que celui de l'esprit, de la parole et du comportement. Ce qu'elle a de particulier, c'est qu'elle va un peu plus loin dans la recherche de l'origine des pathologies", explique Pierre Ricono*, expert en médecine tibétaine.
Ce serait en réalité une synthèse réalisée au 8e siècle de notre ère entre les trois grandes médecines : chinoise, unani (arabe et persane) et ayurvédique (indienne).

Le diagnostic en médecine tibétaine
Il y a des règles à suivre la veille d'une consultation. "Il faut s'abstenir d'un certain nombre d'aliments du type café, viande rouge, alimentation trop riche ou trop grasse pour que le pouls ne soit pas parasité par des excès."

Au début de la séance, le médecin tibétain commence par prendre les pouls, comme en médecine traditionnelle chinoise.
"Par les pouls il va se faire une idée de l'état des organes pleins (cœur, poumon, rate, foie, reins) et des organes creux (estomac, intestin grêle, gros intestin, vésicule biliaire, vessie, organes sexuels)", explique Pierre Ricono. "Mais par rapport à la médecine chinoise les pouls sont inversés et ne sont pas lus de la même manière."

"Le médecin tibétain va également analyser l'urine du patient en regardant sa couleur, les bulles quand on l'agite, les dépôts… Comme dans la médecine ayurvédique, il va examiner la langue. Il va regarder également les six veines qu'il y a dans chaque œil et qui renvoient aux organes. Pour les enfants, il va examiner l'arrière des oreilles."

Les rêves sont l'un des éléments du diagnostic. "Ils permettent de confirmer le déséquilibre de certaines humeurs. Par exemple dans le cas d'une maladie grave, l'analyse des rêves permet au médecin tibétain d'avoir une idée de la longévité de la personne", affirme Pierre Ricono.

Changer le comportement
En fonction de son diagnostic, le médecin tibétain propose d'abord à son patient de réformer son comportement en terme de rythme de vie et d'alimentation.
"On est dans la médecine du 3e millénaire : 90 % de la plupart des pathologies sont dues à des désordres alimentaires. Il faut donc privilégier certains aliments. Selon la médecine tibétaine, il y a six grandes saveurs : douce sucrée, salée, amère, acide, astringente, épicée… Chacune a une action rééquilibrante."

Une pharmacopée originale
Les médicaments tibétains sont principalement composés de plantes qui sont traitées en infusion ou en décoction puis réduites en poudres.
"On peut soi utiliser ces poudres de plantes mélangées avec de la farine d'orge, soi on en fait des pilules de toutes les couleurs, astringentes et piquantes, soi on les mélange à des beurres ou des vins médicinaux qui en facilitent la répartition dans le corps. Certaines pilules contiennent des éléments végétaux et minéraux (or, argent, mercure purifié), ce sont les médicaments les plus puissants qui existent", énumère Pierre Ricono.

Des thérapies corporelles
Le yoga tibétain, Lu Jong, est un équivalent du Qi Gong chinois, une sorte de gymnastique douce pour se maintenir en bonne santé. "Il s'agit de cinq ou six mouvements qu'on enchaîne et qui permettent de maintenir un état corporel en souplesse, un esprit présent concentré dans ce qu'il fait."

On peut également avoir recours à l'hydrothérapie (bains), à des massages thérapeutiques (Ku Nyé), ou au Reiki tibétain (Tsa Lung). La moxibustion est utilisée comme en médecine traditionnelle chinoise mais les cônes d'armoise sont fabriqués différemment.

Où trouver un praticien ?
La médecine tibétaine est présente dans certains pays d'Europe. "Elle est remboursée aux Pays-Bas et dans certains cantons suisses", explique Pierre Ricono (voir encadré).

En France, on ne peut pas consulter de médecins tibétains. On peut néanmoins se renseigner au Centre Kalachakra où un médecin tibétain, Wendai Tsering, anime des stages de massages, de phytothérapie, de diététique, d'introduction à la médecine tibétaine. "Il peut prendre aussi les personnes en entretien", précise Pierre Ricono.

Vers une médecine intégrative ?
Pour Pierre Ricono, il faut arrêter d'opposer l'allopathie et les médecines traditionnelles. "Toutes les médecines ont quelque chose à apporter. Chacune détient la partie d'une réponse. Il y a tellement de diversité dans les formes de vie chez les êtres vivants que toutes les approches sont bonnes. Il faut les marier et non les opposer, trouver des passerelles et travailler la main dans la main."

 

*Pierre Ricono est un scientifique, attaché à la Cité des Sciences et de l'Industrie depuis 25 ans. Il a également obtenu en Inde une maîtrise en Reiki et suivi au New Yuthok Institute of Tibetan Medecine de Milan une formation de 4 ans en naturopathie tibétaine.
Il est l'auteur de La médecine tibétaine, éditions Grancher.

 En savoir +

Les centres de formation dans le monde

En Inde, il y a trois collèges de médecine tibétaine (Men Tsee Khang) : à Dharamsala, cette ville du Nord de l'Inde ou est établi le gouvernement tibétain en exil, au Ladakh et à Darjeeling.

En Chine, il y a de nouveau des formations de médecine tibétaine, les anciens collèges de Lhassa ont rouvert.
"C'est venu du fait qu'un grand médecin tibétain, Tenzin Choedrak, emprisonné pendant 30 ans dans les prisons chinoises, a soigné ses geôliers et des responsables politiques chinois qui se sont rendu compte de l'impact de cette médecine. Il a donc été réhabilité et a fini sa vie à Dharamsala où il est redevenu médecin auprès du Dalaï Lama", raconte Pierre Ricono.

À Amsterdam, la Fondation néerlandaise pour la Médecine Tibétaine (NSTG) fait venir du monde entier des praticiens en médecine traditionnelle. Les soins y sont remboursés.
"Chaque année l'un des meilleurs étudiants diplômés de Dharamsala a la possibilité d'aller en résidence dans ce dispensaire. C'est ce qu'a fait par exemple Lobsang Tsultrim, le fils d'un des médecins du Dalaï Lama, qui y a installé ensuite son cabinet."

À Milan, l'institut New Yuthok propose une formation qui ressemble à ce qui est enseigné à Dharamsala.

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