Dépression, déprime : les antidépresseurs, c'est pas automatique

Dépression, déprime : les antidépresseurs, c'est pas automatique

La France est le pays où l'on consomme le plus d'antidépresseurs par habitant. Le problème, c'est que beaucoup de personnes en dépression majeure ne sont pas traitées et d'autres le sont alors qu'elles ne devraient pas…

Image

Sommaire

- Consommation d'antidépresseurs : le paradoxe

- La dépression sévère : une maladie récidivante

- Efficaces, les antidépresseurs ?

- Antidépresseurs et psychothérapie

- Mal-être, déprime : éviter les antidépresseurs

"Au troisième rang des maladies invalidantes derrière le cancer et les maladies cardio-vasculaires, la dépression majeure, selon l'OMS, risque de passer au deuxième rang en 2020. C'est en France aujourd'hui la première cause du nombre de journées d'arrêts de travail." David Gourion, psychiatre, donne la dimension de l'enjeu à l'occasion des 31e Rencontres des Médecines Alternatives et Complémentaires à l'Hôpital Tenon, le 19 octobre dernier.

Consommation d'antidépresseurs : le paradoxe
Et pourtant, "bien que nous soyons le pays qui consomme le plus d'antidépresseurs par habitant, nous sommes également le pays où les déprimés sont le moins traités. Du reste, on a des statistiques de suicides en augmentation, c'est aujourd'hui la principale cause de mortalité avant 40 ans", déplore Michel Lejoyeux, chef de service de psychiatrie et d'addictologie à Bichat-Beaujon.

Le problème ? "La dysconsommation d'antidépresseurs est liée à une non-connaissance de ce qu'est la maladie dépressive. Quand on a une dépression sévère et mélancolique, il faut donner des antidépresseurs et dans plein d'autres cas, c'est une aberration d'en donner."

La dépression sévère : une maladie récidivante
Selon Michel Lejoyeux, "la dépression est une vraie maladie, différente du spleen ou des émotions négatives."

De plus, "la dépression majeure est une maladie qui a plutôt tendance à récidiver. Plus elle va être récurrente, plus cela va incrémenter le risque de récurrence ultérieure. La dépression isolée une fois dans la vie ne représente que 40 % des premiers épisodes dépressifs majeurs", ajoute David Gourion. Et c'est un maladie qui a une action sur le développement de pathologies annexes : "des problèmes cardio-vasculaires ou d'autres affections dues à une fragilisation immunitaire entraînée par les mécanismes inflammatoires du vieillissement oxydatif".

C'est dire s'il est important de savoir si l'on traverse une dépression majeure, de la traiter et de faire disparaître les symptômes résiduels en fin d'épisode dépressif !

Efficaces, les antidépresseurs ?
Une étude britannique (Irving Hirsch) a montré que le prozac n'est pas plus efficace qu'un placebo. La question de l'efficacité de ces médicaments est donc posée. David Gourion incite à nuancer la réponse : "c'est vrai pour les dépressions légères et modérées mais c'est faux pour les dépressions sévères. Dans ce dernier cas, le prozac est 50 à 100 % plus efficace que le placebo."

Pour Henri Lejoyeux, les antidépresseurs se valent tous. "J'utilise en monothérapie des IRS (inhibiteurs de la recapture de la sérotonine) dont le Prozac, le Deroxat, le Zoloft et, chez la personne âgée, le Seropram.
Les formes les plus graves de la dépression sont les plus sensibles aux antidépresseurs classiques. Mais plus c'est prolongé, inscrit dans une histoire de vie, de personnalité, plus ce sera résistant."

Antidépresseurs et psychothérapie
L'association des antidépresseurs avec la psychothérapie, notamment la thérapie cognitive comportementale, a fait la preuve de son efficacité.

"Les antidépresseurs n'ont pas de sens s'ils ne sont pas associés à un travail relationnel : psychothérapie, activité physique, réflexion sur soi, thérapies comportementales… La psychiatrie oblige à ne pas être sectaire et à associer les techniques."

Mal-être, déprime : éviter les antidépresseurs
"Dans les cas de dépression névrotique du genre "je vais mal depuis toujours", avec des symptômes qui sont moins graves que ceux de la dépression mais qui sont réellement invalidants, les antidépresseurs classiques ne vont pas bien fonctionner. Il s'agit d'une indication privilégiée pour les médecines alternatives et complémentaires", précise Henri Lejoyeux (Voir : Troubles de l'humeur : les propositions des MAC).

"Les antidépresseurs et benzodiazépines représentent depuis les années 50 une véritable révolution médicale, ils ne doivent pas être diabolisés, juste utilisés avec un peu plus de discernement… ou parfois substitués par ceux qui savent le faire", conclut Serge Rafal, l'organisateur des Rencontres de Tenon.

 En savoir +

Les symptômes de la dépression sévère

Pour Michel Lejoyeux, "il n'y a pas de petite ou de grande dépression. Il y a dépression ou pas."

Les quatre symptômes qui font la différence sont :
- le désintérêt, la perte de l'envie ;
- le ralentissement physique et psychique ;
- les troubles du sommeil et de l'appétit, la fatigue ;
- la perte de l'estime de soi, le sentiment de culpabilité.

Au médecin ensuite, sur les mêmes symptômes, de faire la différence avec une hypothyroïdie, un début de diabète ou de maladie d'Alzheimer, des troubles bipolaires, une surconsommation d'alcool, une tristesse chronique, ou une dépression post-partum (chez la mère après la naissance d'un enfant)… "Il n'y a pas de détermination génétique sur la maladie dépressive."

Vie Saine et Zen