Polluants éternels : nettoyer l’Europe des Pfas coûterait entre 95 et 2 000 milliards d’euros en vingt ans

Polluants éternels : nettoyer l’Europe des Pfas coûterait entre 95 et 2 000 milliards d’euros en vingt ans

Éliminer les Pfas des sols et des eaux européennes coûterait jusqu’à 100 milliards d’euros par an.

C’est le résultat d’une enquête du journal "Le Monde" et de plusieurs médias, publiée le mardi 14 janvier dernier et s’appuyant sur des travaux universitaires et des investigations réalisées dans le cadre du consortium de médias "Forever Lobbying Project". L’estimation est basse car elle "n’inclut ni l’impact des Pfas sur nos systèmes de santé, ni une myriade d’externalités négatives trop difficiles à quantifier"…

Une première enquête en 2023 avait recensé "au moins 23 000 sites pollués" en Europe par ces substances chimiques utilisées couramment pour leurs propriétés antiadhésives, déperlantes ou antitaches.
Quasi indestructibles, ces "polluants éternels" regroupent plus de 4 700 molécules qui s’accumulent avec le temps dans l’air, le sol, les rivières… jusque dans le corps humain. Avec à la clé : cancers, infertilité, toxicité pour le rein, le foie ou le système immunitaire… La liste des pathologies liées à une exposition aux Pfas (prononcer "pifasse") ne cesse de s’allonger.

En collaboration avec deux chercheurs, les journalistes se sont appuyés sur "les rares informations scientifiques et économiques disponibles" ainsi que sur "des données locales collectées auprès de pionniers de la dépollution". 
- Un scénario hyper optimiste : aucune nouvelle pollution aux Pfas dès demain, une dépollution limitée aux sites prioritaires et aux polluants aujourd’hui réglementés, pas de prise en compte des nouvelles substances utilisées depuis le début des années 2000. Coût : 4,8 milliards d’euros par an.
- Un scénario plus raisonnable : la pollution se poursuit et l’on procède à un nettoyage poussé. Coût 100 milliards d’euros par an, ce qui représente plus de la moitié du budget annuel de l’Union européenne !

Il faut avoir en tête que "la décontamination pose un immense défi technologique et logistique". Faute de plan coordonné à l’échelle européenne, chaque pays improvise ses propres recommandations, ou ignore simplement le problème.
Fera-t-on valoir le principe du pollueur payeur ? Ou le coût sera-t-il répercuté sur le consommateur ?
La conclusion de l’enquête est sans appel : "il nous reviendra toujours moins cher de cesser d’émettre des Pfas que de décontaminer".

En février 2023, 5 états (Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Suède et Norvège) ont proposé à l’Europe une interdiction de toute la famille des Pfas. L’initiative a été soutenue par le gouvernement français. Le député Les Ecologistes, Nicolas Thierry, a réussi en avril à faire interdire par l’Assemblée Nationale les usages non essentiels des Pfas.
Au niveau européen, le projet d’interdiction est visé, depuis des mois, par une intense campagne de lobbying et de désinformation orchestrée par… les pollueurs qui n’ont, pour l’instant, à peu près rien payé.

 

Source : Libération, Eléonore Disdero - 14/01/25

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