Organe multifonctions, la langue est un acteur majeur dans la vie pour manger, déguster, respirer, dormir, parler, embrasser ou se tenir debout… Voilà pourquoi une mauvaise position de celle-ci dans la bouche peut être plus dommageable qu’on croit !
Sommaire
- 17 muscles intrinsèques ou extrinsèques
- Les nerfs, les papilles et les six saveurs
- Respirer par le nez
- Une bonne position au repos
- Soigner la mastication
- Troubles de la déglutition
- Le GPS du corps
- Rôle central dans l’articulation de la parole
- Hygiène quotidienne
La langue est la cheffe d’orchestre de l’organisme.
“Téter, boire, manger, goûter, respirer, dormir, sentir, parler et même se tenir debout, ne peut se faire sans cet organe qui, rassemblant 17 muscles, forme le muscle le plus puissant du corps humain”*, explique Catherine Thibault, orthophoniste. Pour elle, la langue peut être un formidable atout de bien-être.
17 muscles intrinsèques ou extrinsèques
La langue est constituée et contrôlée par deux groupes de muscles : les muscles intrinsèques qui ont une origine et une insertion à l’intérieur de la langue ; les muscles extrinsèques qui ont une origine à l'extérieur et une insertion dans la langue. Les premiers sont responsables des petits mouvements de la langue, des ajustements de forme et de position. Les seconds permettent à la langue d’effectuer des déplacements vers l’avant, l’arrière, le haut, le bas, les côtés. 17 muscles en tout, qui façonnent et canalisent la langue afin qu’elle se loge contre le palais, sans déborder sur les dents et sans contact avec les lèvres et les joues…
Les nerfs, les papilles et les six saveurs
Presque tous ces muscles sont innervés par le nerf hypoglosse qui commande les mouvements. Et ce sont les nerfs vague, lingual et glossopharyngien qui transmettent au cerveau les informations sensitives et gustatives captées par les fameuses papilles, situées sur la face dorsale, la pointe et les bords de la langue.
Certaines papilles gustatives renseignent sur la texture des aliments : mou, dur, doux, rugueux… D'autres permettent de ressentir les saveurs : sucrée, salée, acide, amère, umami et une sixième, récemment découverte, que certains chercheurs désignent sous le vocable “oleogustus” (le goût du gras).
Respirer par le nez
“On ne le dira jamais assez : il faut respirer par le nez. Et pour respirer par le nez, la langue est un organe-clé, chez l'enfant comme chez l'adulte, de jour comme de nuit”*, affirme Catherine Thibault.
La respiration par la bouche est antinaturelle, selon elle, toujours en lien avec une mauvaise position de la langue.
Le problème est qu’on ne nous apprend pas à respirer. Il faut souvent avoir recours à des disciplines comme le yoga, les arts martiaux, les techniques de relaxation, la sophrologie, la méditation, la Cohérence cardiaque… Toutes ces techniques permettent de retrouver une respiration abdominale (diaphragmatique ou costo-abdominale) qui autorise le nez à remplir sa fonction de filtre.
Une bonne position au repos
Pour cela, la langue doit être, au repos, dans une bonne position : sa pointe et ses bords latéraux collés au palais derrière les dents du haut, les bords de la langue étalés sur le pourtour du palais sans déborder des deux arcades dentaires. Les molaires sont jointes sans tension, les lèvres doivent être délicatement fermées.
Soigner la mastication
Une bonne mastication contribue à un bon équilibre sur le plan physique et émotionnel : les dents coupent et écrasent les aliments, la langue et les joues regroupent les morceaux et les mélangent avec de la salive. Le bol alimentaire ainsi constitué sera ensuite dégluti.
“Il est fondamental de mastiquer et de bien mastiquer, c'est-à-dire d'utiliser les deux côtés au cours d'un cycle de mastication. La mastication normale est alternée, un côté après l'autre, comme la marche une jambe après l’autre.”*
Troubles de la déglutition
Difficultés à avaler, toux après ingestion de solides, liquides et/ou salive, sensation d'aliments collés dans la gorge… Les troubles de la déglutition (dysphagies) peuvent être à l'origine de plusieurs complications : malnutrition, déshydratation ou infection pulmonaire. Ils doivent être pris en charge sur le plan diététique et par une rééducation de la déglutition, orthophonique ou kiné.
Le GPS du corps
La langue joue également un rôle important dans la proprioception, la perception du corps dans l’espace qui assure l'équilibre, le contrôle des mouvements et nous renseigne sur l'activité du corps. Elle fait partie d’une chaîne verticale : yeux-bouche-mains-diaphragme-pieds où elle joue le rôle d’un fil à plomb ou d’un GPS.
Rôle central dans l’articulation de la parole
Dans la parole, la langue fait partie des articulateurs avec les lèvres, les mâchoires, le voile du palais, pendant que les résonateurs (pharynx, bouche, nez) transforment le son émis par les deux cordes vocales. C’est dire si elle joue un rôle central, notamment dans le diagnostic et la rééducation des défauts de prononciation.
“À tous les âges de la vie, il nous faut porter attention à ce que dit l'autre et non à la forme de sa parole”, tempère Catherine Thibault. “Et que le trouble soit articulatoire ou pas, l'entourage doit éviter d'être dans l'injonction, le directif. (…) Patience et écoute sont les bonnes réponses. Approuver les ébauches imparfaites en reformulant correctement ce qui a été dit. Aider en ayant nous-mêmes un parler plus ralenti et plus simple et en pratiquant le renforcement positif dans nos commentaires.”*
Hygiène quotidienne
Catherine Thibault prêche pour une hygiène buccodentaire minutieuse et systématique (brossage des dents matin et soir). Elle propose également des exercices simples pour rétablir sa ventilation nasale, augmenter le contrôle moteur de ses lèvres et de sa langue, intégrer la bonne position linguale de repos, acquérir une déglutition correcte, améliorer son expression…
*La langue, La vie privée d’un organe très discret, Catherine Thibault, éditions L'Archipel
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Foetus et bébé : champions de la succion-déglutition
Le foetus : un athlète de haut niveau
Déjà dans le ventre de sa mère, le fœtus s’entraîne comme un athlète de haut niveau. Sans cesse, il suce ses doigts ou ses orteils et déglutit du liquide amniotique. Il développe également le sens des goûts et des odeurs, sensible à certains composés aromatiques des aliments qui passent dans le liquide amniotique par le biais de la circulation sanguine.
La succion est la fonction la plus précoce dans l'espèce humaine. Ainsi, à la naissance, le bébé pourra s’alimenter et déglutir jusque’à deux litres par jour ! Et il crie ou pleure pour alerter : il a faim !
“Manger-parler : le duo de l'oralité commence à se former, orchestré par la langue”*, précise Catherine Thibault, orthophoniste.
Au fur et à mesure de sa croissance, la bébé va ensuite rôder l’axe corporel oeil, langue, main, pied. Il va notamment développer l’agilité de ses lèvres et de sa langue pour mieux manger et mieux parler.
Débusquer les tics de succion
Mais dès la petite enfance peuvent s’installer des tics de succion : autour de la tétine, de certains doigts (souvent le pouce mais aussi l’index ou le majeur), de la joue, des lèvres voire des mâchoires (comme le bruxisme : contraction involontaire des mâchoires).
Il faut y être attentif car ces tics peuvent être dommageables à l’âge adulte. Ils peuvent provoquer une déformation du palais, des dents, des mâchoires, être un frein à la bonne évolution de la parole, contribuer à maintenir une déglutition infantile (mouvement lingual d’avant en arrière), entraîner une mastication plus compliquée…