Victime directe ou simple spectateur, vivre des scènes de violence conduit au symptôme de stress post-traumatique. L'EMDR est aujourd'hui l'une des meilleures solutions…
Sommaire
- Toutes les victimes ?
- Quels en sont les symptômes ?
- Séquelles plus sévères quand il y a des morts ?
- Mêmes symptômes pour les spectateurs ?
- Et les spectateurs des images TV ou vidéo ?
- Les prises en charge possibles ?
- Au bout de combien de temps ?
- Combien de séances ?
- En quoi consiste une séance ?
- Évolution sur la durée du programme ?
- Efficace pour tout le monde ?
- Des données chiffrées ?
- Trouver un bon thérapeute en EMDR
Il peut s'agir de l'attentat du 11 septembre 2001, du tsunami de décembre 2004 ou plus récemment des massacres dans les locaux de Charlie Hebdo et dans l'Hyper Casher de la porte de Vincennes… Comment résoudre le stress post-traumatique qui suit ? Les réponses de Christophe Marx*, psychothérapeute, praticien accrédité EMDR** Europe.
Toutes les victimes sont-elles susceptibles de subir des séquelles traumatiques ?
Christophe Marx : Oui, il est probable que les victimes qui ont subi un tel stress, une telle menace sur leur vie soient toutes exposées à un stress post-traumatique.
Quels en sont les symptômes ?
CM : Le patient souffrant d'un trouble du stress post traumatique éprouve un sentiment de désespoir ou d'horreur associé à des symptômes persistants : intrusion, évitement, hyperstimulation et différents troubles psychosomatiques. (Voir encadré.)
Les séquelles sont-elles plus sévères quand les victimes ont vu des personnes mourir ?
CM : Oui, le spectacle de la mort est éminemment traumatisant, d'autant plus quand la mort est donnée volontairement.
Les mêmes symptômes menacent-ils les spectateurs directs, ceux qui "passaient par là" ?
CM : Oui, même si l'on n'a pas été soi-même la victime, les séquelles psychologiques concernent également les spectateurs.
Et les spectateurs des images TV ou vidéo ?
CM : Ces images médiatisées par la TV peuvent également traumatiser certaines personnes qui vont se "projeter" dans l'image et vivre l'événement "comme si" cela se passait réellement près d'eux. Et on a vu des personnes sensibles ou fragilisées par leur histoire personnelle développer un stress post traumatique à partir du visionnage d'images violentes.
Quelles sont les prises en charge possibles ?
CM : Certains médecins peuvent prescrire des anxiolytiques, ou des somnifères légers. Mais on s'accorde à dire que les antidépresseurs ne sont pas indiqués. La psychothérapie et particulièrement l'EMDR ont une place de choix dans la désensibilisation et le retraitement de l'événement traumatisant. Mais on ne peut pas donner de recettes : cela dépend de la personne, du contexte, de son histoire… et des habitudes du praticien.
Au bout de combien de temps faut-il démarrer une thérapie EMDR ?
CM : Le plus rapidement possible : nous avons désormais des protocoles spécifiques pour les événements récents.
Combien de séances faut-il envisager ?
CM : Une poignée de séances (le terme est délibérément vague). Mais cela peut déboucher sur des souffrances plus complexes, plus anciennes, plus enfouies, auquel cas il faudra prolonger la thérapie. Le but est de proposer une thérapie efficace et adaptée à la personne et à la situation. Si cela doit prendre quelques mois, c'est que c'est nécessaire. Le psychisme nécessite un temps de guérison qu'on ne connait pas d'avance et qui est incompressible. À charge pour le thérapeute de faire en sorte qu'il soit le plus court possible !
En quoi consiste une séance EMDR ?
CM : Le protocole de désensibilisation utilise les SBA (stimulations bilatérales alternées) visuelles, tactiles ou auditives. Il s'agit de stimuler alternativement le côté droit et le côté gauche du corps en suivant des yeux la main du thérapeute, par exemple. On demande au patient de repenser à la scène traumatique, de dérouler mentalement le film de l'événement. Pas besoin qu'il se force à la revivre, avec toute la souffrance qui va avec. S'il n'arrive pas à y repenser, les thérapeutes EMDR peuvent utiliser aussi cette difficulté pour aider le cerveau à retraiter le traumatisme.
Comment cela évolue sur la durée du programme ?
CM : La thérapie EMDR se déroule sur huit phases, et il faut évidemment plusieurs entretiens pour "balayer" toutes les cibles. Il existe de nombreuses variantes au protocole de base, qui permettent de s'adapter au contexte de chaque situation et de chaque personne.
Est-ce que l'EMDR est efficace pour tout le monde ?
CM : À priori, personne n'est à exclure de l'indication de l'EMDR, pas même les enfants, même en bas âge.
A-t-on des données chiffrées sur ses résultats ?
CM : Elles sont légion : l'EMDR est la technique de traitement du stress post-traumatique la plus évaluée dans le monde, confirmée par nombre d'analyses et de méta-analyses (analyse d'un groupe d'analyse).
Comment trouver un bon thérapeute en EMDR ?
CM : Seuls les praticiens apparaissant sur le site de l'association EMDR France sont accrédités par l'association EMDR Europe, et offrent les garanties d'une formation sérieuse (avérée par une procédure d''évaluation et d'accréditation) et d'un engagement déontologique.
*Auteur de L'EMDR, éditions Eyrolles
**Eye movement desensitization and reprocessing (désensibilisation et reprogrammation par mouvement des yeux)
En savoir +
Les symptômes
- Intrusion : la personne revit l’événement traumatisant. Il ne s’agit pas seulement de vagues réminiscences, mais d’incapacité à empêcher ces souvenirs de revenir le hanter. Il s’agit de véritables flash-backs envahissants. En effet, l'angoisse ressentie lors de l'expérience traumatisante peut être de nouveau éprouvée au moment du souvenir. Les cauchemars sont également fréquents.
- Évitement : la personne cherche à éviter les situations et les facteurs déclencheurs qui pourraient lui rappeler la situation qui l'a traumatisée. Elle aura aussi tendance à éviter d’en parler. Cela peut conduire jusqu'à une amnésie partielle ou totale de l'événement. Les émotions seront atténuées ou émoussées, et cela pourra aller aller jusqu’à une insensibilité émotive. La personne n'a plus d'intérêt pour les activités qui autrefois la passionnaient, se replie sur elle-même et fuit ses proches. Elle souffre difficultés de communication car elle a du mal à s'exprimer correctement. Au pire, on peut observer un état de dissociation. Ces comportements d'évitement sont des réflexes indépendants de la volonté de la personne.
- Hyperstimulation : la victime souffre de plusieurs symptômes d'hypervigilance et a du mal à se concentrer. Les troubles du sommeil ne sont pas rares associés à de la nervosité, une tendance à s'effrayer facilement, une impression constante de danger ou de désastre imminent, une grande irritabilité ou même un comportement violent. Un sentiment intense de détresse peut survenir lorsque l'individu est exposé à des éléments qui évoquent l'événement traumatisant.
- Différents troubles psychosomatiques : douleurs, crispations, tachycardie…