Le deuil : accepter le chagrin et retrouver la vie

Le deuil : accepter le chagrin et retrouver la vie

Malgré nos vaines tentatives pour garder la mort à distance, nous avons tous à y faire face un jour ou l'autre. C'est une des épreuves les plus difficiles de la vie. Être attentif alors aux bouleversements émotionnels et corporels qui nous secouent permet de traverser cette période le mieux possible.

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Sommaire

- Transformer les croyances limitantes
- Processus et travail
- Un séisme corporel
- Les cinq étapes d'Elisabeth Kübler-Ross
- Le déni
- La colère
- Le marchandage
- La dépression
- L'acceptation
- L'accueil de la transformation
- Se faire accompagner

Non, le deuil ne veut pas dire oublier ou ne plus penser à la personne disparue.
Non, la souffrance ne diminue pas avec le temps.
Non, son intensité et sa durée ne témoignent pas du degré d'amour porté au défunt…
Ce sont quelques-uns des mythes qui sont associés communément à la notion de deuil (voir encadré).

Transformer les croyances limitantes
"Ces croyances limitantes viennent de ce que nous ont transmis nos parents, nos éducateurs, l'école, la télévision, les médias, les réseaux sociaux, ce subtil conditionnement sur ce qui est acceptable, ce qui ne l'est pas, bien ou mal, correct ou déplacé"*, explique Martine Spiesser, psychothérapeute, addictologue et instructrice de Mindfulness.
Il conviendra donc de transformer ces croyances en les réexaminant à la lumière de nos ressentis profonds.

Processus et travail
La traversée du deuil inclut deux phases essentielles et concomitantes :
- le processus de deuil, un mécanisme automatique et inconscient de cicatrisation intérieure qui se met en place naturellement ;
- le travail de deuil qui concerne tout ce qu'on met en place volontairement et activement : seul, avec l'aide de proches, de professionnels de santé ou de psys.

Dans le cadre d'un travail de deuil, il s'agit d'accueillir ses ressentis et ses émotions, d'exprimer sa souffrance de manière verbale ou non verbale, de revisiter son histoire commune avec le défunt, de choisir les bonnes personnes pour se faire aider, de se recentrer sur soi-même.
Il s'agit d'apprendre, selon Martine Spiesser, "à "intégrer" le défunt en vous pour qu'il soit une partie de la personne que vous êtes devenue et continue ainsi à "vivre" en vous"*.

Un séisme corporel
Il faut aussi traverser une expérience corporelle proche du séisme. "L'intégralité de notre corps réagit à la mort d'un être cher ; nos organes, nos muscles, nos os, toute notre homéostasie sont aussi chamboulés"*. À la clé : douleurs, diarrhées, stress chronique, épuisement, perte de libido, troubles de la mémoire, affaiblissement du système immunitaire, insomnies…

Les cinq étapes d'Elisabeth Kübler-Ross
Martine Spiesser cite les célèbres travaux Elisabeth Kübler-Ross, une psychiatre suisse, qui a décrit les cinq émotions ressenties par des malades en phase terminale avant leur mort : le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l'acceptation (pas forcément dans cet ordre). Ce modèle s'appliquerait également aux différentes phases du deuil.

Le déni
Une première étape consisterait donc à reconnaître la perte en surmontant le déni, l'état de choc, de sidération.
À l'annonce du décès les réactions peuvent être très diverses.
"On peut se sentir anesthésié, épouvanté, confus, transpercé de sensations violentes, d'engourdissement, de flottement. (…) Il est possible aussi que l'annonce du décès provoque des larmes ou des cris, des sensations de vertige, d'étouffement, de douleur, voire de panique."*

La colère
La deuxième étape est une réaction à la séparation : colère, révolte, recherche de fautifs, besoin de retrouver le défunt sur le plan sensoriel.

Le marchandage
La troisième consiste à se remémorer nos attitudes avec le défunt : c'est le moment du marchandage, de la culpabilité. C'est le moment du "si seulement…", du "j'aurais dû…". C'est aussi le moment de faire ce qu'on peut en accueillant le manque le mieux possible.
"On ne peut s'empêcher de se sentir coupable, surtout si notre estime de soi est un peu abîmée ou si des deuils anciens n'ont pas été vraiment faits."*

La dépression
La quatrième étape est une phase de déstructuration : le renoncement, les regrets, la tristesse conduisent à un vécu dépressif.
"Le deuil étant un processus de guérison, la dépression est une des étapes nécessaires sur la voie du rétablissement"*, affirme Élisabeth Kübler-Ross. Il faut toujours se souvenir qu'éprouver des émotions, ce n'est pas être malade, c'est être vivant.

L'acceptation
La cinquième étape est celle de l'acceptation : la restructuration d'un nouveau monde.
"Accepter c'est apprendre à vivre avec la perte"*, précise Martine Spiesser. Il ne s'agit pas de résignation mais de permettre à ce qui est déjà là d'exister, sans lutte ni résistance.

L'accueil de la transformation
Aux cinq étapes d'Élisabeth Kübler-Ross, Martine Spiesser ajoute une sixième : la restructuration ou la manière de réinvestir différemment la vie et le monde.
"La restructuration, c'est une longue phase de redéfinition des liens avec vous-même, avec les autres, avec le monde et avec votre défunt."*
C'est le constat de la transformation intérieure qui a pu avoir lieu au cours de cette traversée.

Se faire accompagner
Il va de soi qu'aucune règle ne vient s'imposer : chacun vit les étapes ou pas, dans l'ordre qui est le sien et sur la durée qui lui convient.

S l'on se sent en panne au milieu des émotions douloureuses, il est toujours possible de faire appel à des professionnels : médecin traitant, psychiatre ou psychologue. Bien des disciplines peuvent accompagner de manière bénéfique : méditation de pleine conscience, sophrologie, EMDR, yoga… En prenant soin d'éviter les sectes, on peut aussi trouver refuge dans la spiritualité.

Martine Spiesser dépose de jolis mots comme un baume sur des blessures de chagrin : "C'est l'amour qui vous fera tenir debout ! Ces liens subtils tissés dans l'intime avec vous-même, ces fils de tendresse qui vous lient aux autres et vous soutiennent au cœur de la tourmente du deuil."*

 

*Les traversées du deuil, Accueillir le chagrin et renaître à la vie, Martine Spiesser, éditions Leduc

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Souffrir

Le mot deuil vient du latin "dolus", du verbe "dolere", souffrir.

Il désigne en français, notamment :
- la rupture d'un lien émotionnel après le décès d'un être cher, parent ou personne proche ;
- le lent processus universel et naturel de guérison intérieure après la perte d'une figure d'attachement (un être cher, un animal, un lieu de vie, un travail) ou une perte symbolique (statut social, partie de soi, jeunesse…).

"Pour la psychanalyse, le processus de deuil serait l'ensemble des processus psychologiques par lesquels le sujet parvient progressivement à se détacher d'un être cher qui est mort en évitant l'effondrement intérieur et en élaborant de nouveaux liens avec lui"*, explique Martine Spiesser.

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